Arrêt de la Cour d'Appel en référé : GAIA ne peut pas faire le lien entre Renmans et la souffrance des chevaux d'abattage en Argentine
GAIA dévoile une nouvelle vidéo d'enquête sur le commerce de viande chevaline en Amérique latine
L'organisation de défense des animaux GAIA n'est pas autorisée à dire que la chaîne de boucheries Renmans cautionne la maltraitance des chevaux d'abattage en Argentine. En outre, GAIA ne peut pas montrer d'images de chevaux maltraités à la clientèle de Renmans dans le but d'accuser la chaîne de cautionner et/ou d'être impliquée dans cette maltraitance de chevaux argentins. Voilà l'arrêt que la Cour d'appel de Bruxelles a récemment rendu en référé. Renmans exigeait également que l'association GAIA soit empêchée de faire publiquement le lien, de quelque manière que ce soit, entre d'une part la vente par Renmans de viande chevaline d'Argentine, et d'autre part la maltraitance des chevaux en Argentine. La chaîne de boucheries demandait en outre une indemnisation à hauteur de 12.000 euros pour ses frais d'avocat. Mais la Cour d'Appel a jugé que ces deux dernières demandes étaient exagérées. « Je suis déçu, mais GAIA n'est pas réduit au silence pour autant », réagit le président de l'organisation, Michel Vandenbosch. GAIA diffuse d'ailleurs aujourd'hui une nouvelle vidéo d'enquête sur le commerce de chevaux d'abattage blessés et maltraités en Amérique latine. Pour ce qui concerne le jugement, l'organisation de défense des animaux va se concerter avec son avocat pour envisager d'éventuelles actions en justice.
En novembre 2016, Renmans portait plainte contre GAIA. En cause, une vidéo publiée sur le site de l'organisation, montrant le traitement des chevaux d'abattage en Argentine, accompagnée d'un article intitulé : « Renmans cautionne la souffrance des chevaux ». A travers un micro-trottoir, publié sur le site de GAIA, l'organisation de défense des animaux demandait aux clients de Renmans ce qu'ils en pensaient. Par la suite, la chaîne de boucherie avait reçu des milliers d'e-mails de protestation. Affirmant que sa « réputation » subissait un dommage, Renmans avait alors déposé plainte auprès du tribunal civil de Bruxelles siégeant en référé, en exigeant la somme astronomique de 25.000 euros d'astreinte par jour. Le 25 janvier 2017, le tribunal condamnait GAIA à supprimer la vidéo et le communiqué de son site, sous peine d'une astreinte tout de même 25 fois moins élevée (1000 euros au lieu de 25.000 euros). GAIA était allé en appel contre cette décision.
Une combine ?
Les juges en référé reconnaissent que les images diffusées par GAIA montrent des cas de maltraitance sur chevaux, mais considèrent que la situation s'est améliorée depuis 2016. Ils font référence aux premières conclusions tirées par des chercheurs de la KUL (Université catholique de Louvain), qui – à la demande de la FEBEV (la fédération belge de la viande) – ont examiné notamment en 2017 plusieurs abattoirs argentins et transports de chevaux. Ces visites étaient cependant à chaque fois annoncées. Ces premières conclusions sont par ailleurs très prématurées, puisque ce travail n’a pas été finalisé. Il est à noter que l'avocat de Renmans a néanmoins fait référence à ces conclusions, sans que les chercheurs de la KUL n'en soient informés ni l'autorisent – comme ceux-ci l'ont indiqué à l'organisation GAIA, qui fait par ailleurs partie du comité d'accompagnement de cette étude.
En outre, l'entreprise belge Equinox, qui est le fournisseur en viande chevaline de Renmans, et aucunement son représentant, était présente à chaque séance du procès, et s'entretenait fréquemment avec l'avocate de Renmans. Une combine ?
Les entreprises qui importent et vendent de la viande chevaline d'Amérique latine maintiennent en place un système qui provoque de la souffrance pour les chevaux, notamment pendant le transport sur de longues distances, qui ne respecte même pas les normes insuffisantes de l'UE en la matière.
Auparavant, la Commission européenne avait interdit l'importation de viande de cheval mexicaine (2015) et plus tard brésilienne (2016) après avoir inspecté les rapports et les images de GAIA et de ses partenaires.
Nouvelle enquête
« Les nouvelles images que nous dévoilons aujourd'hui démontrent à nouveau la souffrance que subissent les chevaux d'abattage en Argentine et en Uruguay », commente Michel Vandenbosch. Cette souffrance visible sur la vidéo d'enquête est par ailleurs confirmée par une vétérinaire experte en équidés. La viande de ces chevaux est importée en Europe, et notamment vendue en Belgique. « C'est un fait incontestable que Renmans vende de la viande de chevaux qui ont été abattus en Argentine. »
En juin 2017 et entre octobre et décembre 2017, l'association suisse Tierschutsbund Zürich a conduit une enquête approfondie auprès de plusieurs abattoirs et centres de rassemblement en Argentine et eu Uruguay. Dans les centres de rassemblement, les animaux ne disposent de pratiquement aucune protection contre le soleil cuisant ou la pluie battante. Fractures, jambes infectées, blessures ouvertes, articulations enflammées, sabots non entretenus... ; les blessures graves sont fréquentes, et les chevaux sont laissés à leur sort sans aucun soin vétérinaire. Nous voyons également des animaux dans une situation de maigreur, et présentant un pelage dans un piteux état.
Dans l'enceinte des abattoirs, les conditions ne sont pas meilleures. Nous y voyons également des chevaux blessés qui ne reçoivent aucun traitement. Des animaux souffrant de blessure à l'œil, de fracture de la mâchoire ou de la jambe... Les employés d'abattoir font preuve d'incompétence, et manipulent les chevaux avec brutalité. Nous voyons par exemple un employé refermer une lourde porte métallique sur le dos d'un cheval. Les animaux sont frappés à la tête de manière routinière et à répétition, ce qui provoque chez eux de la panique. Beaucoup des chevaux envoyés à l'abattoir sont des animaux de réforme, qui ont été utilisés pour des courses ou des rodéos. Ils doivent également subir un transport sur souvent plusieurs centaines de kilomètres dans un camion inadapté, direction l'abattoir.
« Les enquêteurs ont aussi observé des chevaux sans marque d'identification à l'oreille, qui étaient déchargés à quelques dizaines de mètres de l'abattoir Clay, en Uruguay. Au moment du rechargement dans le camion, ils portaient tous une marque d'identification, censée prouver leur origine. Des chevaux non identifiés ont également été observés aux abattoirs Lamar (Argentine) et General Pico (Argentine). Il s'agit clairement de cas de fraudes et d'un manque manifeste de traçabilité, ce qui comporte d'ailleurs un risque pour le consommateur », dénonce le président de GAIA, Michel Vandenbosch. La législation européenne interdit en effet l'abattage de chevaux sans marque d'identification. Il est dès lors préoccupant que certains supermarchés et d'autres acteurs du secteur, qui parlent sans cesse de traçabilité optimale, continuent de vendre de la viande chevaline en provenance de pays où l'origine et le bien-être des animaux ne peuvent pas être garantis.
Prise de conscience dans le retail belge
Afin de pouvoir être exportée vers l'Union européenne, la viande chevaline d'Amérique latine doit simplement répondre aux règles européennes qui ne s'appliquent qu'aux abattoirs. La législation européenne sur le transport ou l'élevage d'animaux n'est pas d'application hors UE. Il est par exemple autorisé de transporter des animaux en Argentine pendant 24 heures sans temps de repos, eau ni nourriture.
Colruyt, Makro, Aldi, Delhaize et Lidl ont arrêté de vendre de la viande chevaline en provenance d'Amérique latine. Les chaînes Carrefour, Intermarché, Champion, Match, Cora et Renmans continuent, elles, de vendre de la viande chevaline issue d'Amérique latine. GAIA demande que soit arrêtée la vente de viande chevaline de ces pays.
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