Dans l’enfer de la viande chevaline en Argentine, en Uruguay et au Canada
Campagne internationale : 13 organisations de défense animale dénoncent les abus
Bruxelles, le 12 juin 2019 – La route qui mène de la viande de cheval américaine à notre assiette reste semée d’abus, de négligence et de fraude. De nouvelles enquêtes menées en Uruguay, en Argentine et au Canada par le Tierschutzbund Zurich et l’Animal Welfare Foundation, deux organisations partenaires de GAIA, en témoignent. « La Belgique est le deuxième importateur de viande chevaline d’Argentine et d’Uruguay », explique Ann De Greef, directrice de GAIA. « Il est grand temps que tous les supermarchés belges cessent de vendre cette viande cruelle, en provenance d’Argentine, d’Uruguay et du Canada. En outre, l’UE doit interdire l’importation de viande équine en provenance de ces pays. Notre première enquête sur la souffrance des chevaux en Amérique latine date de 2010. Depuis, l’industrie a fait de nombreuses promesses, mais en réalité, la situation ne s’est pas vraiment améliorée. »
Treize organisations européennes, nord-américaines et sud-américaines de défense des droits des animaux, dont GAIA, dénoncent des abus persistants : les centres de rassemblement des chevaux, leur transport, les ventes aux enchères et les abattoirs s’avèrent toujours des foyers de souffrance et de maltraitance des chevaux. Les chevaux épuisés, malades, blessés ou mourants ne reçoivent aucun soin vétérinaire. Tant en Amérique latine qu’au Canada, les chevaux sont peu ou pas protégés contre les conditions climatiques extrêmes. Au Canada, les chevaux passent des mois à l’extérieur dans un froid glacial, à des températures allant jusqu’à -30°C. Les poulains meurent de froid à la naissance. L’origine des chevaux est souvent inconnue, mais pas la destination de leur viande : l’Europe et surtout la Belgique, qui reste une des principales plaques tournantes de cette industrie. « Notre première enquête sur la maltraitance des chevaux en Amérique latine date de 2010 », explique la directrice de GAIA. « Entre temps, l’industrie a fait beaucoup de promesses, mais sur le terrain, les conditions ne se sont pas améliorées. »
Plaies ouvertes
La situation en Amérique latine est désastreuse. Les organisations partenaires Tierschutzbund Zurich et Animal Welfare Foundation ont filmé les conditions dans lesquelles sont traités les chevaux dans et autour des abattoirs Clay et Sarel (en Uruguay) et Lamar et Land L (en Argentine) entre avril 2018 et janvier 2019. Les chevaux malades avec des blessures ouvertes, des abcès et des jambes cassées ne reçoivent aucun soin. La souffrance des chevaux à l’agonie n’est pas soulagée non plus. Entassés pendant les longues heures de transport, ils ne reçoivent ni eau, ni nourriture et sont battus à coups de bâtons et maltraités avec des aiguillons électriques. Les chevaux sont également poursuivis par des chiens. Dans les postes de rassemblement, des chevaux en panique s’emmêlent dans les barbelés. « Cette enquête montre également que le système de traçabilité n’est pas du tout fiable », explique Ann De Greef. « Le fait que seul le dernier propriétaire – souvent celui qui les achète pour l’abattoir – soit tenu de déclarer l’origine du cheval et les médicaments qui lui ont été administrés soulève de sérieuses questions sur la sécurité alimentaire. Certains chevaux, par exemple, viennent de rodéos et de courses et sont gavés d’anabolisants. »
En janvier et février 2019, les conditions de vie des chevaux ont aussi été filmés sur le terrain de l’abattoir Bouvry en Alberta, au Canada. Les chevaux sont maintenus plusieurs mois à l’extérieur sans aucune protection contre les intempéries, sous la neige, sous la pluie et à des températures qui descendent jusqu’à -30°C. Les juments enceintes ne sont pas séparées du reste du groupe et leurs poulains meurent souvent à la naissance. Les aires de repos sèches et propres manquent à l’appel ou sont insuffisantes. Les chevaux qui saignent, qui ont des blessures ouvertes aux jambes et qui ne peuvent plus se redresser sont totalement laissés à leur sort. Qu’ils soient blessés ou mourants, ils ne reçoivent aucun soin vétérinaire. Afin de les engraisser rapidement, les chevaux sont nourris avec des aliments beaucoup trop riche en protéines, ce qui les rend sensibles aux coliques extrêmement douloureuses.
Label et audits européens
En 2010, GAIA a mené ses premières enquêtes en Uruguay, en Argentine et au Brésil. Ces images ont conduit de nombreux supermarchés belges à cesser d’acheter de la viande de cheval issue de ces pays. Aldi, Colruyt et Makro ne vendent que de la viande de cheval européenne (Colruyt Europe se fournit hors Roumanie). Delhaize et Lidl ne vendent plus du tout de viande de cheval.
En 2015, l’Europe a interdit l’importation de viande équine en provenance du Mexique et du Brésil. La même année, est créée « Respectful Life », une initiative commune de la Fédération de la Viande Belge (FEBEV) et de la KU Leuven, visant à améliorer le bien-être animal. Des chercheurs de la KU Leuven effectuent des visites dans les abattoirs et les centres de rassemblement, en Uruguay et en Argentine. « Mais il s’avère que c’est une mesure inutile », explique Ann De Greef. « Les visites sont annoncées et les abattoirs s’y préparent systématiquement à l’avance. Par exemple, les nouvelles images montrent comment, en amont d’une telle inspection, des abris ont été mis en place et comment les chevaux malades et blessés sont écartés vers des enclos moins visibles. »
Le dernier rapport d’inspection de la Commission européenne en Uruguay (2018) fait également état de graves lacunes « dans les écuries des abattoirs ». Selon le rapport officiel, « la situation dans les centres de rassemblement visités soulève de nouvelles et graves questions concernant le bien-être des animaux au moment de la mise à mort ».
Bien que l’équipe de contrôle ait demandé à l’avance que les centres de rassemblement des abattoirs soient opérationnels pendant le contrôle, ils étaient vides dans les trois abattoirs. Les inspecteurs ont constaté « un nombre réduit d’abris couverts » et « un nombre encore plus réduit d’abreuvoirs ».
Trois supermarchés dans le viseur
GAIA appelle les consommateurs à cesser d’acheter de la viande de cheval provenant d’Uruguay, d’Argentine et du Canada. « Nous exhortons également la Commission européenne à interdire les importations en provenance de ces pays, comme ce fut le cas pour le Brésil et le Mexique », souligne Ann De Greef. Enfin, via www.gaia.be/fr, chacun peut envoyer un e-mail de protestation aux supermarchés (Carrefour, Match et Renmans) qui vendent encore de la viande de cheval issue de ces pays. Suite au lancement de notre campagne, Albert Heijn a informé GAIA qu’il suspendait la vente de viande de cheval fumée « parce que le label ‘Respectful Life’ n’apporte plus assez de garanties en ce moment ». En tout état de cause, la chaîne de supermarchés ne commercialise pas de viande de cheval fraîche.
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